Amiens
Couvert
La Poésie
Le monde de la poésie est un monde parallèle au notre qui n'a rien à voir avec la vie bassement matérialiste dont nous sommes imprégnés.
Quand on y entre, on a l'impression de se déconnecter de la réalité, ça a quelque chose d'effrayant, on a peur de lâcher prise et que la redescente sur terre soit d'autant plus dure et douloureuse.
POEMES ECRITS EN 1977
FROID
Lisa lui disait:
"je veux dormir dans un grand lit
Près d'une cheminée en flammes,
Alors qu'il pleut dehors,
Que c'est l'hiver,
Que c'est Décembre".
Il répondait:
"J"irai couper du bois et
Te ferai du feu."
Mais en chemin, il rencontra une belle, ne coupa pas le bois et ne rentra pas.
Lisa mourut.
De froid?
Ma Peine
Il y avait ma peine
Dans mon coeur, fidèle.
Je l'ai ficelée dans un grand sac,
Jetée dans un torrent,
Chassée.
Mais le sac a buté sur une pierre
S'est ouvert.
Ma peine, fidèle, est retournée dans mon coeur.
L'Innocent
L'innocent traverse des pays
Verts, roses et gris,
Il n'en voit que la folie!
L'innocent se heurte souvent
A des pics, à des glaciers géants
Mais il reste toujours un enfant
L'innocent connait l'amour
Et tout ce qu'il fait naître.
Dès qu'il le voit, il ferme sa fenêtre.
Arbre Mort
Dans sa lumière
Il y avait des comètes violettes.
Tout se dont je me rappelle
C'est que les étoiles volaient aussi dans ma tête
Et que je ne voulais pas qu'elles s'arrêtent.
Je ne sais plus ce qui s'est passé.
Les clowns du cirque,
Jaloux de ma lumière,
L'ont éteinte sans remords
Et depuis je suis un arbre mort.
Zigs-zags (ou Détours, je n'arrive pas à me décider car les 2 titres conviennent également)
Il s'approche d'elle
Berce ses yeux de son regard froid
Attend
Elle s'éloigne de lui
Danse et saute, dans ses habits de clown,
Attend
Il se cache dans un coin noir
Illumine sa soirée d'un sourire,
Attend
Elle rit et chante, triste,
Et le maquillage fond, le sourire disparaît
Attend
Il la regarde, sous ces lumières blafardes
De cette soirée gâchée,
Attend
L'Essentiel
L'atmosphère est bleutée, ou verte,
Ou peu importe.
Voilà deux jours déjà
Que la vie a commencé
Et que l'avenir est présent.
Votre vie s'arrête volontiers
Ou involontiers à mes côtés.
Qu'importe le temps!
Voilà bien cent ans
Que je me préparais à vous voir
Et à connaître enfin la vérité,
L'Essentiel.
- Je te connais, disait-il, plus que tu ne crois.
- A quoi sert de me connaître si tu ne m'aimes pas?
Moi je t'aime, mais à quoi me sert de t'aimer,
Puisque je ne te connais pas?
Un jour sans Lui
Moi sans Lui,
Un soleil noir
La lune ricane
Source tarie
L'air, indécis, vole,
Plane, s'abat tout contre moi,
Me presse en lui, s'enfuit,
Emporte, vole mon bonheur.
Le ciel ne pleut pas tant que moi
Mes larmes, comme les feuilles d'automne
Coulent sans bruit
Un jour sans Lui.
Mirage (écrit en 1975 et remanié en décembre 2009)
Ils ont quinze ans. Il a un visage à la Modigliani. Il ressemble à un Indien. Il est si calme et tranquille, apaisant, dénué de tout orgueil. C'est important pour elle. Il est sombre, grave, sérieux. Il aime la philosophie. Comme elle. Il fait des détours pour la voir. Leurs regards s'interpénètrent. Il la rencontre sortant de son rêve aux confins effrayants de la réalité. Ils sont enfermés dans leurs prisons raisonnables et sécurisantes. La réalité ne sera jamais plus belle que le rêve. Est-ce pour cela qu'ils se fuient? Qu'ils se croisent en regards sans suite? De crainte de briser la beauté, de briser le rêve, l'idéal, de laisser à la place du rêve le néant? Ils sont terrifiés par le néant. Ils se délectent et souffrent à la fois de ce silence créateur d'images. Ils n'aiment pas la banale réalité, ils refusent ce qui est fade et routinier. Plutôt ne rien vivre du tout. Un jour, ils se retrouvent, neuf ans après et ils passeront l'après-midi à se regarder, des heures durant. Un autre jour, ils se croiseront et se retourneront en même temps, mais poursuivront leur route, chacun dans des directions opposées. Ils sont pusillanimes, timorés, lâches. Ils refusent la possibilité d'un échec. Ils ont peur de se connaître, ils préfèrent imaginer l'autre tel qu'ils veulent qu'il soit. Ils préfèrent l'illusion captieuse, fallacieuse. Ils sont jeunes, ils ont besoin d'absolu. Peut-être ne l'a-t-il pas atteinte pour la garder? Ces images la poursuivront pendant des années jusqu'à ce que l'absence le lui fasse oublier, c'est à ça que sert l'éloignement, à éviter la souffrance de l'attente inutile.
Ils ne se seront jamais parlé.
Un jour, des années après, elle le rencontrera, et découvrira avec étonnement, soulagement et frayeur, qu'il ne représente plus rien pour elle. Il fallait bien refouler son image, se défendre de lui pour ne pas souffrir, lutter contre ses sentiments pour ne pas s'auto- détruire et pour survivre. Et elle se demande aujourd'hui, après tant d'histoires ineptes si c'était lui. Etait-ce lui?